Tic. Tac. Tic. Tac. Oui, je le sais, je le sens (non il ne se fou pas de moi), vous avez entre vos deux oreilles la douce musique d’une horloge. Douce mais aussi intrigante, mystérieuse ou encore flippante. Chacun voit la peur à sa porte. Quelle est cette heure demandez-vous ? A quoi ce bruit correspond t-il ? A la pendule du combat. La pendule de l’avenir. La pendule du destin. Donnez-lui le nom que vous voulez après tout, je m’en fiche. C’est une propriété d’Aaron Keinz. Peut être a-t-il regardé trop de film. En tout cas, il l’aime cette horloge. Ce monstre de bois, ce monstre d’engrenages. Des rouages qui tournent sans cesse comme pour rappeler au jeune homme que l’heure est toujours en approche et que le temps lui offre une multitudes d’aventures toutes plus étonnantes les unes des autres. Aujourd’hui encore il devait se lever pour aller affronter les démons de son patron. C’était les siens par logique mais pas par cœur. Le brun se moque bien de qui il tient entre ses mains. S’il y a du sang sur les mains, ce n’est que bonus, ce n’est que malus mais pas la crainte d’avoir tué son prochain. Tuera t-il quelqu’un ce soir encore ? Peut être. Aucune émotion ne se lit sur le visage du jeune homme. Il s’en moque. En plus il se réveille. N’en demandez pas tant. Il regarde le plafond usé de sa cachette, allongé nonchalamment sur son lit. Il a de la classe. Il a du style. Il a des manières. Mais dans sa grotte, l’homme en est un comme tant d’autres. Un enfant au réveil qui se frotte les yeux devant la douleur de quelques rayons du soleil qui se sont engouffrés entre les barres du volet. Celui-ci grinca d’ailleurs lorsque le jeune Altarien c’était levé pour le monter. Ses yeux se plissèrent. Mais il sourit –oui oui c’est possible- à la vue de son bord d’immeuble préféré. A moitié ébranlé mais où le poète pouvait passer des heures à admirer la folle ville qui s’étale juste en dessous de lui.
Soudain la porte s’ouvre. C’est le signal. Oui, un nouveau. Celui d’une demande, celui d’une mission. Le jeune homme descend les marches du bâtiment comme un zombie tellement il connait par cœur ce genre de situation. Chaque fois qu’Alexei a besoin de lui, il demande à quelqu’un d’ouvre la porte de la dame des Altars. Comme un tigre que l’on aurait mit en cage, personne n’est là quand il sort, personne n’est là pour lui dire que faire. Il sait. Il sort de la cage et rejoint le dresseur de fauves. Pas un mot qui ne sert à rien. Toute façon, Aaron n’aurait pas répondu. Il se moque bien de toutes ces broutilles de langages et le patron le sait. Alors ce dernier se contente de lui dire ce que le chevalier servant doit faire. Aujourd’hui, ça à l’air important. Un ton plus solennel. Une légère accélération dans les mots. Aaron ne sait pas vraiment si c’est liée à de l’excitation ou de l’inquiétude. Même si d’ordinaire, il s’en fiche, le jeune homme aurait bien aimé savoir si son patron était en danger ou non. Barf, si déjà il obéit et fait ce qu’il a à faire, il aura aidé le chef des Altars. C’était tout se qui comptait : se sentir utile. Le pion d’échec n’en avait que faire des retrouvailles amicales, des marques d’affection, des envies de sauver le monde… Il n’avait qu’à avancer de case en caser et illuminer ceux qui s’approchent un peu trop du roi.
« Pour diverses raisons que tu n'as pas besoin de connaitre, j'ai besoin que tu suives un homme et que tu me rapportes tout ses faits et gestes. Il s'appelle Nigel, il fait partit du Cirque si tu vois où c'est. Sois discret. Ne fais pas de vague. »Le brun sauvage avait écouté attentivement la demande de son patron. Droit, le visage inexpressif, il ne regardait pas Alexei dans les yeux comme un signe de soumission. Mais il relève la tête vers lui une fois la requête énoncée terminée. Cette action pour finalement répondre :
« … Vous me connaissez. Ce sera fait.»Une tirade courte, une tirade brève. Rien de mieux pour illustrer le personnage. Ce dernier résumait, dans le fait de le connaître, qu’il y aurait évidement aucune bavure, qu’il sera évidement discret et qu’évidement, le boulot sera bien fait. Patati Patata. Et oui, ce sera fait. Toute façon Aaron est un lion, Aaron est un tigre. Tant qu’il n’aura pas sa proie entre ses griffes, entre ses dents, il ne lâchera pas. Il fait une légère courbette comme le majordome des siècles précédents et tourne les talons pour retourner dans sa chambre se préparer. Il entend des murmures. Il ne fait pas attention. A peine passé le pas de la porte de sa cachette, l’entrée est d’un coup bouchée. C’est le signal. Un nouveau signal. Porte fermée, mission acceptée. Aaron fronce les sourcils, se concentre. Il prépare son outillage, se vêtit d’une tenue sombre et ressort de la pièce… Par la fenêtre. Il emprunte un escalier de métal et arrive en haut de l’immeuble. La ville lui souriait et semblait lui chuchoter
« C’est partit, viens…
Viens mon petit.
Viens courir sur mes murs.
Viens te battre dans un murmure.
Viens jouer au chat et à la souris
A la tombée de la nuit.
C’est partit… »Alors il se lance. Sans hésitation, sans réflexions. Comme un chat il court entre les caisses de bois, les cheminées ou encore les antennes. Comme des millions d’insectes les maisons commencent à changer. Peu à peu les fourmis s’enfoncent dans le sol pour ne plus être des immeubles, ne plus êtres des monstres d’acier mais de grandes maisons et des marchés sans fins. Aaron était à San Polo. Un morceau de la ville qu’il appréciait. Sans doute sa curiosité ou sa passion pour les arts et l’histoire qui ont fait de lui un admirateur des vieilles bâtisses et des ambiances épicées.
Vu. Repéré. Le chien voit le chat. La partie commence. Attention aux coups de griffes. L’homme a le cœur qui bat. L’homme, tapit derrière un haut de cheminée observe. Comme un chat de gouttière il se balade de toits en toits et comme un chat de gouttière il scrute la souris. Celle-ci se balade entre les draps colorés des marchés de cette journée ensoleillée. Aaron était un assassin envoyé par le patron. Mais il ne fallait pas qu’il s’embarque. On lui avait demandé de le surveiller. On lui avait dit de ne pas faire de bavures. Peut être même de ne pas tacher le sol. Pourtant une touche de rouge ne ferait pas de mal dans ce décor animé. Tant pis. Il s’en occupera plus tard. Il s’approche doucement, sans bruit. Se cache derrière un sac de farine. Se cache derrière un tonneau de vin. Aussi discret qu’un chat il identifie le personnage et l’enregistre dans une partie de sa tête. Il saura s’en servir pour plus tard et pourra rapporter ses premières impressions sur l’inconnu au boss.
Ce qu’il voit dans son analyse espionnétique ? Un jeune homme pas plus gros qu’une brindille. Des cheveux colorés. Un homme qui sourit aux passants, qui sautille presque sur place et qui caresse un ou deux chats sur le passage. Tch. Un homme joyeux et profitant de la vie ? Il trouvait ça tellement ridicule et d’une hypocrisie sans limites. Tant mieux, cela renforcerait la forme qu’il mettrait dans la mission. Plus l’homme lui parait idiot, naïf ou pas intéressant, Aaron n’en est que plus concentré dans sa tache. Il guette. Il guette. Et soudain il agit. La cible venait d’entrer dans une ruelle avec un peu moins de monde. Seule compagnie les poubelles. Triste vie que d’être un ramassé de déchets. Avait-il besoin d’amis ? Non, d’un raccourci. Pas de chance. Son envie de gagner du temps allait finalement devenir une perte de précieuses minutes puisque Aaron venait d’atterrir devant lui. Oui c’était le mot puisqu’il venait de descendre rapidement, de caisses en caisses, du haut du toit. Prudent, et conscient de son arrivée quelque peu originale, le brun peigna une légère courbette de la finesse de ses membres en mouvements tout en ouvrant un large bec pour laisser tomber une première tirade :
« Nigel... c'est bien ça ? »Raah Aaron ! On t’avait pourtant dit que la phrase d’accroche la plus naturelle qui soit était de dire bonjour ! Certainement pas de montrer que tu connais son nom… le laissant imaginer pire scénario et imaginer qu’un stalkeur peut t’espionner depuis plusieurs heures –ce qui n’était pas faux- ou plusieurs années. Tant pis. Encore une fois, l’associable allait devoir remédier à ça…
Bienvenue sur l’échiquier Nigel ~